Les plus belles réalisations de cet artisan, et bien d’autres encore, se trouvent dans le livre "Les armuriers Liégeois à travers leurs réalisation.
1800 - 1950".
Pour tous les détails voir : LES ARMURIERS LIEGEOIS
PIRE J. & Cie
La Manufacture d’armes de guerre, de chasse et d’exportation Pire d’Anvers, officiellement connue sous le nom Etablissements J. Pire et C°, a été créée en 1885 par Jules Pire, d’origine liégeoise, son père Nicolas, armurier à l’armée belge, lui ayant sans doute inoculé le virus des armes. Toujours est-il que le jeune Jules Pire, grand amateur d’armes et d’armes anciennes, arrive un beau jour à Anvers et acquiert une maison Avenue De Keyser (33 encore en 1899, devenue 41 en 1904 selon les prix courants que nous avons pu consulter), l’avenue “chic” d’Anvers puisque faisant la jonction entre la gare (dite de l’Est jusque l’inauguration, quasiment au même endroit, de l’actuelle Gare Centrale en 1905) et la ville proprement dite. Il y établit le siège de la société Jules Pire et C° en 1885 et il se lance d’emblée dans le commerce d’armes et de munitions, bien sûr, mais avec deux accents supplémentaires bien particuliers: le rachat de surplus militaires d’une part, les armes pour les colonies d’autre part, surtout l’Etat indépendant du Congo. C’est ainsi que la société va racheter partout en Europe des surplus des armées belge (temps heureux où l’ABL ne mettait pas ses armes déclassées au pilon...), française, des différents “états” ayant constitué l’Allemagne, italienne, espagnole, voire même cubaine! Fusils, pistolets, baïonnettes, lances, sabres, casques, cuirasses: tout cela est stocké dans d’anciens chenaux d’Anvers (les “ruien”) qui ont été voûtés, et est nettoyé et vendu au fur et à mesure de la demande. La consultation des catalogues des années 1900 fera baver les collectionneurs. Qu’on se le dise: tout a bien entendu été vendu depuis...
Jules Pire veille aussi à sa succession et en 1888 naît son fils Raoul, qu’il enverra très jeune aux Etats-Unis. Il y travaille trois ans chez le célèbre armurier de New York Shoverly Daily & Gale dont il devient même le sous-directeur, principalement chargé des achats auprès des grandes sociétés comme Winchester et Remington, mais aussi du contrôle des armes achetées en Europe, avant leur vente sur le marché américain.
Pendant ce temps-là, les activités sont florissantes à Anvers, par l’armurerie traditionnelle, par les ventes d’armes de panoplie et par les armes pour le Congo. Il faut se souvenir qu’à l’époque, et encore après la 2e GM, on ne s’embarquait pas vers la Colonie sans un bon revolver et un bon fusil de chasse, voire une carabine pour le tir au gros gibier. Les élèves de l’Ecole coloniale d’Anvers et les colons constitueront pendant des décennies un important marché pour la maison Pire. Elle envoyait d’ailleurs tous les jours plusieurs colis postaux constitués chacun d’une boîte métallique (fabriquée par la société Schulbroek qui faisait également celles bien connues des biscuits De Beuckelaere), elle même placée dans une boîte de bois, contenant 150 cartouches et pesant dix kilos.
Revenu des Etats-Unis, Raoul Pire ajoutera une autre corde à l’arc de la société, à savoir le skeet, le tir aux pigeons d’argile, au point de créer à Schilde, près d’Anvers, en 1919, un stand qui organisera rapidement des championnats internationaux et sera copié un peu partout en Europe (Paris, Genève, etc.). Cela va provoquer un engouement énorme pour les fusils superposés de la FN, que la maison Pire vendra beaucoup dans la haute société anversoise. Notons qu’un peu avant la 2e GM, S.A. le Prince de Ligne demanda à Raoul Pire de lui aménager un stand de skeet en son domaine de Beloeil, ce qui valut l’honneur au fils de Raoul, Jules, petit-fils du fondateur (qui nous a fait l’honneur et le plaisir de nous retracer toute l’histoire de la société), d’être reçu dans la grande salle à manger du château et d’y déjeuner, à côté de la Princesse! Le stand de Schilde, dont les activités furent arrêtées dans les années 1970, eut, à la Libération, un hôte illustre, à savoir le Général Armstrong, qui commandait l’artillerie anti-aérienne défendant Anvers et son port, principalement contre les attaques des V1.
Revenons un peu en arrière: après la 1e GM, devant le développement des activités, le siège de l’avenue De Keyser était devenu trop exigu et l’armurerie Pire déménagea tout près, dans une rue perpendiculaire, le n° 10 de la rue van Ertborn. C’était une ancienne boucherie (Kappers) avec de grandes caves (d’une longueur de 30m), aux murs bien épais pour ne pas déranger les voisins car on y tuait précédemment les cochons... c’est dire que les caves servirent de stand d’essai pour les armes de tout genre.
C’est l’époque où la maison Pire mit sur le marché ses fusils aux marques (toujours) déposées “Buffalo” (système à triple verrou Greener) à chiens extérieurs, et “Trajector”, un fusil hammerless à platines système Holland & Holland. Ces armes étaient fabriquées à Liège. La maison Pire a aussi vendu nombre d’autres armes, FN, Martini, Warnant, Mauser, Luger, etc.
On notera aussi que la maison Pire est également liée à deux autres établissements, l’armurerie Van Cauwenberghe au Suikerrui, M. Van Cauwenberghe étant le mari de la soeur de Raoul Pire (activités arrêtées fin des années 1970, début 80). Et un peu plus loin, au quai Van Dyck, se trouvait une autre maison Pire, spécialisée dans la coutellerie et les armes bon marché pour les marins dont les navires, à cette époque, accostaient encore le long des quais de l’Escaut.
Début 1970, expropriée pour la construction de l’Antwerp Tower, la maison Pire déménagea à l’Appelmansstraat où elle se trouve toujours, désormais confiée aux soins de Raoul, fils de Jules Pire, petit-fils de Raoul et arrière petit-fils de Jules Pire, le fondateur. On soulignera que Jules Pire (le deuxième du nom, né en 1926,) passa trois années à Liège à l’Ecole d’Armurerie après la 2e GM.
GP
Carabine de "jardin" ou de "salon"